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Dans cette analyse, le Comité Action Palestine revient sur une question fondamentale : l’Etat d’Israël peut-il avoir une légitimité ?

Le texte rappelle un principe aussi essentiel qu’élémentaire en droit politique : force ne fait pas droit. Le problème de tout pouvoir est celui de la durée : pour se conserver, le pouvoir ne peut s’appuyer sur la seule force. Il a besoin d’être reconnu comme légitime par ceux sur lesquels il s’exerce.

Le Comité Action Palestine avance ici l’hypothèse que l’entité sioniste est vouée à dépérir de ses propres contradictions. Ce qui donne corps à cette hypothèse, c’est l’analyse d’un processus historique dans lequel la violence criminelle que l’Etat juif n’a cessé d’exercer sur le peuple palestinien entre en conflit avec sa quête de légitimité. Autant, en effet, demander aux Palestiniens qu’ils reconnaissent la légitimité de leur négation et qu’ils renoncent à exercer leur droit légitime de résistance, droit auquel le Hamas ne renonce pas.

Le peuple palestinien refuse de se soumettre. Les sionistes enragent, car en 60 ans de massacres, de vols et de nettoyage ethnique, ils n’ont pu obtenir la moindre reconnaissance des Palestiniens.

Certes, ils diront que la reconnaissance d’Israël a été obtenue de l’URSS, de l’Angleterre, de la France, des Etats-Unis. Mais il s’agit là d’une reconnaissance nulle de droit, puisqu’elle provient de puissances étrangères coloniales, qui ont accordé aux sionistes un territoire qui n’était pas le leur. Cette « reconnaissance d’Israël » s’est donc faite au détriment des principaux intéressés, les Palestiniens. Ceux-ci n’ont bien sûr jamais été consultés sur une question qui engageait pourtant leur destin ainsi que celui de leurs descendants. Il s’agit donc bien là d’un procédé pervers, de type colonial, et non d’une procédure conforme au droit.

Cela, Israël ne peut l’ignorer. Car, en l’absence d’une reconnaissance – de droit – qu’il ne parvient pas à arracher à ceux qui lui résistent depuis plus de 60 ans, son existence se trouve compromise. Et ce, dans un avenir peut-être pas si éloigné que cela…


L’état d’Israël ou la légitimité introuvable

Si tous les Etats naissent de la violence – et l’histoire du régime sioniste en dit long là-dessus – ils ne peuvent se maintenir dans la durée sans que leur domination soit reconnue comme juste par ceux sur lesquels elle s’exerce. Faute de cette légitimité, ils sont réduits à une guerre sans fin.

Ainsi les sionistes étaient-ils confrontés à cette double question, politiquement essentielle :

1) Comment s’emparer du pouvoir sur la Palestine ?

2) Comment en faire reconnaître la légitimité ? Question plus redoutable encore du fait que le territoire sur lequel ils voulaient fonder leur Etat n’était pas le leur.

A première vue insoluble, elle fut pourtant résolue en partie grâce à l’active complicité de la Grande-Bretagne qui, approuvant la Déclaration Balfour (1917) et l’établissement d’un foyer national juif en Palestine, enfonçait un coin dans le territoire de la Palestine. Quant à la guerre israélo-arabe qui suivit le plan de partition de l’ONU et la proclamation de l’ « Etat hébreu », ils la gagnèrent surtout grâce aux armes anglaises.

Et ils purent encore, détruisant les villages et massacrant leurs habitants, expulser d’un coup par la terreur 800 000 Palestiniens, et rester maîtres du terrain : le crime de guerre comme fondement de la propriété du sol.

Mais Israël reste un Etat de fait. Faute d’accord palestinien, l’épineuse question de sa légitimité reste en suspens.
Les sionistes diront que cette reconnaissance d’Israël a été bien accordée, dès 1948 par l’URSS, en 1949 par l’ONU, dont Israël est devenu membre, par les Etats-Unis, l’Angleterre et la France en 1950, etc. Mais comme on s’est bien gardé de consulter les Palestiniens, que la question intéressait pourtant au premier chef, puisqu’elle devait décider de leur destin, cela relève davantage d’un procédé pervers que d’une procédure conforme au droit.

Quelle que soit la forme de tels actes de reconnaissance, de quel droit exige-t-on des Palestiniens, qui n’y ont pas été associés, qu’ils en acceptent les conséquences ? Même si c’est à leur détriment comme en 1950, lorsque la déclaration anglo-franco-américaine reconnut Israël et ses conquêtes de 1948-49, autrement dit la légitimité de leur dépossession ?

Conclus entre tiers, les engagements pris contre eux n’ont pas pour eux force de loi. Car la reconnaissance de la légitimité de l’Etat d’Israël est venue de nations étrangères auxquelles elle ne coûtait rien, puisque ce n’est pas sur leur territoire que le nouvel Etat voulait s’établir, ni leur peuple, autrement dit elles-mêmes, qu’elle condamnait à la mort ou à l’exil…

Et comme ces puissances étrangères n’y perdaient rien, mais tiraient de cette reconnaissance des avantages parfois inavouables dont elles avaient tout à gagner tandis que les Palestiniens avaient – jusqu’à leur existence même – tout à y perdre, les condamnations et les menaces de guerre totale auxquelles les expose leur refus d’y souscrire sont irrecevables et criminelles.

Impuissants à obtenir des Palestiniens qu’ils reconnaissent la légitimité de leur Etat, les sionistes sont réduits à l’emploi de deux moyens : le marchandage ou la guerre exterminatrice. Sans plus de succès d’un côté que de l’autre.

Les négociations d’Oslo de 1993, où Israël et l’OLP se reconnaissent mutuellement, puis la promesse d’une Autorité palestinienne, signée par Arafat et Rabin en présence de Clinton, la fameuse poignée de main, apportent un espoir trompeur aux colombes sionistes qui rêvent à la fois de paix et de légitimité.

Mais en 95 Rabin est assassiné par l’extrême-droite juive, en 96 la droite revient au pouvoir et en 2000 Sharon traverse l’Esplanades des Mosquées et déclenche la deuxième Intifada. Tout est fini.

On peut noter qu’après tant d’années de guerre, la recherche de la paix et de la légitimité réciproque éveille inévitablement des soupçons dans les deux camps. On flaire la ruse de l’ennemi, l’usage de la corruption. Des voix s’élèvent et accusent, à tort ou à raison, les chefs de trahir le peuple.

Ainsi, privés peu à peu de leur soutien populaire, ils perdent leur autorité et les engagements qu’ils peuvent signer restent sans force. Que vaut alors une légitimation de cette sorte ?

Reste la guerre. Comme si l’on pouvait obtenir des consciences la reconnaissance de sa propre légitimité, avec les mêmes moyens que ceux dont on a usé victorieusement lors des conquêtes territoriales militaires.
Décidément, la force rend bête. Qui a gagné la guerre a prouvé qu’il était le plus fort. Il n’a pas prouvé que la guerre était juste. Le droit du plus fort n’est pas le droit.

L’ « ultima ratio regis », le dernier argument du roi, gravé sur le fût des canons de Louis XIV, n’est pas un argument juridique.

La guerre coloniale, asymétrique par définition, où la force est toute d’un côté, et toute la faiblesse de l’autre, ne prouve pas que la possession de la terre ainsi conquise soit autre chose qu’une spoliation, en soi inacceptable et nulle de droit. L’Algérie n’appartenait pas à la France, ni l’Irak aux Etats-Unis, ni la Palestine aux Anglais, qui l’ont donnée aux sionistes. Les seules guerres justes sont les guerres de libération.

Le sionisme surarmé trouve ici la limite de sa puissance. Et il enrage. En 60 ans de guerre où il a multiplié les massacres, semé la terreur, volé la terre, il n’a pu obtenir de ses victimes la reconnaissance d’un droit quelconque.

Face au mur de béton, édifié pour abriter les conquêtes sionistes, se dresse le mur du refus, opposé par les Palestiniens, et particulièrement par le Hamas. Le Hamas, dans lequel Israël voit aujourd’hui le noyau dur de la résistance palestinienne, et qu’il désigne sous le nom d’organisation terroriste islamiste pour tenter de le détruire politiquement.

L’appartenance au « terrorisme islamiste », renvoyant au Mal absolu selon la tradition manichéenne héritée de Bush et Sharon, Israël peut, sans encourir la moindre réprobation des puissances occidentales et des médias, déclarer nulles les élections gagnées par ce parti, assassiner ses membres et leur famille, ou mener une guerre d’extermination contre ses soutiens populaires. C’est bien commode pour éliminer un élément incontournable de la résistance à l’oppression.

La guerre ne se limite pas à l’emploi des armes. La nécessité de se justifier sans cesse, de prouver sa légitimité, l’élargit à l’action psychologique, à la manipulation des esprits. Et le glissement de sens opéré d’un mot à l’autre trouve ici sa place. Ainsi le Hamas, qui se définit lui-même « Mouvement de la Résistance islamique palestinienne » devient, dans la terminologie sioniste, islamiste et terroriste.
Les plus âgés se souviennent que sous l’occupation allemande c’est du nom de « terroristes » que le commandement de la Wehrmacht désignait les résistants français…L’Histoire bégaye et se répète…

On passe d’un mot à l’autre et la « résistance à l’oppression », pourtant reconnue comme un « droit naturel et imprescriptible » dans la Déclaration des Droits de l’Homme (sous la Révolution française), se trouve désormais qualifiée de crime.

A l’opposé, le régime sioniste, drapé dans son statut de victime, invoque son droit à l’autodéfense, et, fort du soutien des Etats-Unis et de l’Europe, s’abandonnant à l’ivresse et à la fureur de la guerre, extermine les populations civiles, et se livre sans honte au terrorisme d’Etat.

L’action psychologique vise à discréditer moralement ses victimes, à les réduire à l’image de bêtes nuisibles, à leur ôter leur qualité d’hommes afin de les massacrer impunément.

Utilisés conjointement, les deux termes d’ « islamisme » et de « terrorisme » se renforcent, éveillant le spectre d’un immense péril dont il faut d’urgence extirper les racines. L’opinion ainsi chauffée ne verra plus dans l’agression contre Gaza un génocide, ni dans le régime sioniste un Etat criminel, mais reconnaîtra dans l’Etat d’Israël le sauveur du monde.

***

Présenté faussement comme le fer de lance dans la lutte du « monde libre » contre le « terrorisme », grâce à la propagande répandue par les médias, noyautés ou achetés à coup de millions de dollars, le régime sioniste dispose des moyens d’engourdir la conscience critique. Il peut masquer le caractère crapuleux de ses véritables buts, qui n’ont pas changé depuis 1948 : l’expulsion de tous les Palestiniens et le vol de toute leur terre. Il peut se soustraire à tout devoir de réparation des dommages causés à ses victimes. (« L’Allemagne paiera », disait-on en 1945, et elle indemnise toujours l’Etat sioniste, tandis qu’Israël, depuis 1948, ne paye rien à ceux qu’il a meurtris et spoliés). Il peut enfin écarter par anticipation toute comparution pour crimes de guerre devant la Cour Internationale de La Haye. Bref, il peut sans entraves détruire, assiéger, affamer, semer la mort, dans la pure tradition de la guerre totale définie par le général prussien Carl von Clausewitz (1780-1831) dans son livre De la guerre.
Que dit Clausewitz ? Que le but de la guerre est d’imposer sa volonté à l’Autre. De l’imposer là où les revendications par voie diplomatique ont été rejetées. « La guerre est la poursuite de la politique par d’autres moyens ». Elle est à la fois violence à l’état brut, et subordination totale à la politique.

Elle est totale encore au sens où, convaincues que le moyen de briser la volonté de l’Autre réside dans la destruction de ses forces vitales, les puissances ennemies jettent dans la bataille tout ce qu’elles trouvent encore à y jeter, jusqu’à l’épuisement et, pour la plus affaiblie, la capitulation…

Mais Clausewitz n’est pas Olmert. Les guerres où il a combattu et puisé son expérience sont les guerres napoléoniennes où s’opposaient en de terribles batailles dont l’issue n’était jamais certaine, de puissantes armées nationales. Quand Olmert prétend mener contre Gaza une guerre totale, on voit bien l’agression barbare, atroce, mais où est la guerre ? Où est la puissante armée adverse ? Où sont ses canons, ses tanks, ses avions, ses hélicoptères, ses navires ? Olmert dispose, lui, de tout cela, sans même épuiser ses ressources, les Etats-Unis y pourvoient…

« La guerre est la sphère du danger » – écrivait encore Clausewitz – aussi le courage est-il la vertu guerrière par excellence ». Mais quel danger courent-ils, et de quel courage ont-ils besoin, ces soldats d’Olmert, hors de portée dans le ciel ? Sont-ils eux-mêmes courageux, et comment peuvent-ils le savoir, tant que l’occasion ne leur est pas donnée de combattre l’Autre d’égal à égal ?

Et ce refus d’engager le combat rapproché, d’affronter la guérilla urbaine, voulu par le commandement israélien fuyant le risque de lourdes pertes, n’est-il pas une brimade de plus imposée aux Palestiniens, écrasés sous les bombes, et qui rêvent d’en découdre, qui voient tomber leurs proches mais que la dérobade de l’ennemi prive du recours à la vengeance, cette vengeance – qu’à défaut de justice – les Romains appelaient « satisfactio » ?

On ne répètera jamais assez combien la force peut rendre bête. Comment Olmert peut-il croire qu’un massacre de plus arrachera aux Palestiniens la reconnaissance d’Israël ?

Car on trouve encore des hommes dont la voix s’entend sous les décombres de Gaza, qui préfèrent périr au combat plutôt que de vivre humiliés, et dont le courage sauve l’honneur de leur peuple.

C’est Olmert, et tout le régime sioniste, qui achèvent de se déshonorer. Ils ne se contentent pas de commettre des crimes, ils les répètent, ils y mettent l’obstination des serial killers. Quand ils bombardent les camps de réfugiés, ce sont les survivants déjà meurtris de leurs précédents massacres, venus se réfugier ici, qu’ils viennent achever. Quand ils tuent un médecin – et ils en tuent beaucoup – ce sont du même coup les blessés que ce médecin ne pourra plus sauver, qu’ils achèvent. La destruction des ambulances, des cliniques, des hôpitaux, obéit à la même logique et aboutit à la même conclusion : pas de quartier. Israël s’est donné, sur les Palestiniens, un droit de vie et de mort.

Mais devant tant d’horreur, la rue partout s’émeut et accuse. Et, conscients de l’affligeante nécessité d’avoir à cacher leurs crimes, les sionistes s’appliquent à donner à leur agression une apparence de légitimité. Ainsi les tirs de roquettes sur les territoires voisins tenus par eux sans droit ni titre, répondaient au blocus qui affame les Gazaouis. Alors que le blocus est lui-même un acte de guerre, ces tirs de roquettes – qui mettent de plus en plus en évidence, il est vrai, l’incapacité d’Israël à protéger le territoire qu’il a usurpé – sont devenus le « casus belli » visant à justifier la tuerie qui s’engageait… A quoi firent écho les médias occidentaux, aboyant d’une seule voix : « Israël a le droit de se défendre ». Bel exemple pavlovien de réflexe conditionné collectif…

Alors que le mobile de l’opération est ailleurs. Il n’est pas défensif. Il est politique. Le Hamas refuse de reconnaître la légitimité d’Israël. Il revendique le droit à la résistance. Il a gagné les élections. Et Olmert veut briser cette volonté. Car si le Hamas venait à être entendu par la communauté internationale, Israël risquerait d’être dessaisi du dossier palestinien, tandis que la solution imposée pourrait ne pas répondre aux conditions posées par lui.

Les plus âgés s’en souviennent peut-être, De Gaulle, parlant des Israéliens, évoquait « un peuple sûr de lui et dominateur ». En fait, il n’est peut-être pas si sûr de lui que ça. La légitimité d’un pouvoir, là où elle est reconnue, n’est jamais définitivement acquise.

La constitution peut en limiter la durée, d’une élection à l’autre, et le Hamas agit à bon droit lorsqu’il refuse toute obéissance à Mahmoud Abbas, dont le mandat est échu depuis le 9 janvier 2009.

En droit, la légitimité devient encore contestable, si le pouvoir qui en jouit trahit les aspirations des dominés. Abbas, trop compromis par ses concessions au profit d’Israël, en fait aujourd’hui l’amère expérience, et Israël aussi.

Les sionistes ont pu découvrir, le 10 novembre 1975, que la communauté internationale pouvait n’être pas aussi docile qu’ils le souhaitaient, lorsque l’ONU adopta la résolution 3379 assimilant le sionisme à « une forme de racisme ». Elle fut abrogée en décembre 1990 sous la pression de l’allié américain, mais la légitimité de l’Etat juif n’en restait pas moins suspecte.

Mais c’est surtout à cause de ses propres contradictions que le régime sioniste a miné le terrain juridique sur lequel il se retranche, chaque fois qu’est remise en question sa légitimité : sa reconnaissance par l’ONU en 1949.
Comment peut-il à la fois en appeler à l’ONU quand son droit est contesté et refuser d’en appliquer les résolutions quand elles sont favorables aux Palestiniens ?

Ainsi les résolutions 194 et 2236, affirmant le droit au retour des réfugiés, ou 242, qui proclame l’inadmissibilité de l’acquisition du territoire par la guerre ont-elles été superbement ignorées.

Incohérence majeure : comment peut-on, un jour, fonder sur l’ONU sa légitimité, et, dès le lendemain, bombarder ses convois, ses écoles, ses hôpitaux, bref la traiter en ennemie ?

Comment, encore une fois, la force peut-elle à ce point rendre bête ? Comment l’entité sioniste ne voit-elle pas qu’en agissant ainsi, elle bafoue et affaiblit l’autorité même de cette ONU derrière laquelle elle abrite sa légitimité ?

Et cela jusqu’à la rendre à son tour illégitime, aux yeux des opprimés, qui, voyant les Palestiniens aidés oui, mais si mollement défendus, n’en attendent plus rien. Ou jusqu’à rendre visible la mainmise sur l’ONU dont usent les Américains, fiers défenseurs des Droits de l’Homme mais soumis aux lobbies, qui ne sont jamais affranchis de leurs préjugés coloniaux et racistes, et qui restent le soutien inconditionnel de l’entreprise sioniste. Mais pour combien de temps ?

Consulté sur l’avenir d’Israël, un modeste historien répondait : « doté d’une armée puissante, mais étranger à la région, entouré de dizaines de millions d’Arabes dont il a, par son mépris, suscité l’hostilité, sa durée sera celle du royaume chrétien d’Orient, un siècle. Et peut-être moins, mais pas plus… ». Affaire à suivre…

Comité Action Palestine

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