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Soutenir la lutte des prisonniers détenus dans les geôles sionistes (Janvier 2013 : N°3)

le 26/1/2013 12:30:00 (293 lectures)

 

« Rien ne symbolise mieux que la prison coloniale la lutte à mort qui se joue entre colon et colonisé. Si la prison est l’éventualité certaine du résistant, la résistance est aussi l’horizon du prisonnier. C’est ce qu’attestent les luttes menées au sein même des geôles sionistes. Les prisonniers sont les martyrs, mais non les victimes de la résistance. Ils en sont les acteurs. Lutter contre la détention administrative et les conditions carcérales, c’est aussi lutter pour que la résistance continue, c’est lutter pour que la société continue d’exister. Parce que le combat des prisonniers est toujours un combat politique, le statut de prisonnier constitue, par conséquent, un repère fondamental de l’identité nationale palestinienne. C’est pourquoi la libération inconditionnelle de tous les prisonniers, palestiniens et arabes, est une revendication centrale de la cause palestinienne.
Cette chronique, produite par Rim al-Khatib, se veut être l’écho de cette lutte. Depuis début 2012, les prisonniers en détention administrative ont lancé un mouvement ininterrompu de grève de la faim. Actuellement Samer ‘Issawi est en grève de la faim depuis plus de 5 mois (150 jours) ».

« Nés libres, nous le resterons »

Soutenir la lutte des prisonniers détenus dans les geôles sionistes

Janvier 2013 : N°3

 
I – Abolir la détention « administrative » 
Le prisonnier Ayman Sharwaneh a décidé de reprendre sa grève de la faim, qu’il avait arrêté pendant quelques semaines, en attendant que le tribunal sioniste revoie son dossier. Or, il ne l’a pas fait. Ayman Sharawneh a mené une grève de la faim de presque 6 mois réclamant la fin de sa détention.
Le prisonnier maqdisi Samer Issawi a été emmené d’urgence dans un hôpital « israélien » suite à la détérioration de son état. Il mène une grève de la faim depuis 180 jours.
Dans une lettre adressée à une association solidaire avec les prisonniers, les prisonniers Tareq Qaadane et Jaafar Izzidine, alors à leur 55ème jour de grève de la faim, annoncent qu’ils refusent dorénavant tous les médicaments et toutes les visites médicales malgré la détérioration de leur état de santé. Ils réclament la libération immédiate de tous les grévistes de la faim et des détenus « administratifs ». Ils écrivent : « nous menons une grève sans précédent dans l’histoire du mouvement des prisonniers. Notre grève sert à colmater les brèches qui ont traversé ce mouvement, essayant de préserver sa pureté et les nobles buts nationaux qu’il a accomplis tout au long des années passées. Dès le début de notre grève, nous avons voulu redonner à la grève sa dignité et son audience. Nous avons décidé de refuser tous les médicaments et tout contact avec les médecins.. Nous étonnant du silence assourdissant envers notre cause, nous nous demandons si nous sommes devenus une charge pour notre peuple dont il faut se débarrasser ? Des centaines de prisonniers souffrent de maladies les unes plus graves que les autres, sans compter le froid qui ronge nos corps, et l’humidité qui gèle notre sang. Nous allons poursuivre notre chemin… jusqu’à obtenir notre liberté (17 janvier). Le conseil dirigeant du mouvement du Jihad islamique dans les prisons sionistes a rendu responsable les autorités pénitentiaires et le gouvernement sioniste de la vie des cadres du mouvement, en grève de la faim, Tareq Qaadane, Jaafar Izzidine et Youssef Shaabane. Il a appelé à la solidarité avec les résistants en lutte et a promis « qu’il ne les laisserait pas seuls dans le champ de bataille ». L’épouse de Jaafar Izzidine poursuit la grève de la faim (29 jours), en solidarité avec les prisonniers en lutte.
Le prionnier Nazih Abu Aoun (50 ans), de Jbaa près de Jénine, a décrit la détention administrative comme étant « une lente exécution à mort du prisonnier et de sa famille », puisque le prisonnier ignore de quoi il est accusé et quand sa détention s’achèvera. Dans une lettre envoyée à un centre de solidarité avec les prisonniers, Abu Aoun a précisé que le but de la détention administrative est de briser la volonté des prisonniers. Le prisonnier Nazih Abu Aoun est en détention administrative depuis juillet 2011. Il avait été fait prisonnier entre 1993 et 1997, puis entre 1998 et 2004, puis entre 2007 et 2010 (soit au total 14 ans d’incarcération).
La détention « administrative » a été renouvelée à l’encontre du prisonnier Ghanem Tawfic Sawalmeh (46 ans) de Nablus, le 18 janvier dernier, quelques heures seulement avant la fin de son incarcération. Les services de renseignements sionistes ont prétendu que sa libération constituait une menace sur la sécurité de la région. Le prisonnier avait rangé toutes ses affaires et salué tous ses camarades de cellules, attendant sa libération. Ghanem Sawalmeh avait été détenu pendant plus de 8 ans, la majeure partie en détention « administrative ». Il avait été refoulé vers Gaza en 2004, puis revenu en Cisjordanie, il a été maintes fois arrêté depuis. Sa dernière arrestation date du 21 juillet 2011, et sans aucune charge contre lui, les autorités de l’occupation prononcent la détention « administrative », renouvelée 3 fois.
La campagne pour l’abolition de la « détention administrative » doit s’élargir. La pression internationale, le boycott des institutions sionistes, la campagne médiatique pour la libération des prisonniers, doivent s’intensifier. Ne laissez pas les prisonniers mourir ! Participez à la bataille pour leur libération ! 
2 – Martyre du prisonnier libéré Ashraf Abou Dhrey 
Lundi 21 janvier, le prisonnier libéré Ashraf Abou Dhrey (Al-Khalil) est décédé des suites de plusieurs maladies graves qui rongeaient son corps depuis sa détention. La négligence médicale de l’occupation envers les prisonniers et les mauvaises conditions de détention entraînent la maladie puis le décès de plusieurs résistants. Abou Dhrey a été détenu pendant 6 ans et demi , il était à moitié paralysé lors de son arrestation. Il fut libéré le 15/11/2012 et immédiatement transporté à l’hôpital d’al-Khalil, étant donné que les autorités carcérales sionistes avaient refusé, tout au long de sa détention, de le soigner. Seule l’occupation est responsable de son martyre, ont affirmé les multiples associations de solidarité avec les prisonniers palestiniens. La négligence médicale, politique d’assassinat intentionnelle, menace plus d’un millier de prisonniers palestiniens. 13 d’entre eux souffrent de cancer, 90 de maladies cardiaques et de diabète. Des milliers de Palestiniens ont participé à ses funérailles, alors que les familles des prisonniers malades craignent de plus en plus pour la vie de leurs parents détenus.
3 – La saison du froid dans les prisons sionistes 
Les associations palestiniennes de solidarité avec les prisonniers ont rédigé plusieurs rapports sur les conditions inhumaines dans les prisons sionistes, notamment pendant la période du grand froid qui a envahi la région. Dans les prisons, c’est l’eau froide et l’interdiction absolue de la réchauffer pour se laver. Les autorités carcérales ont interdit l’entrée de vêtements chauds et de couvertures supplémentaires pour les prisonniers palestiniens. Dans la prison de Hawwara, l’eau est entrée dans les celllules par les fenêtres, que l’occupant a refusé d’isoler. Les eaux ont envahi les cellules de la prison militaire de Atzion au sud de Beit-Lehem, ainsi que la prison de Shatta. De plus, la plupart des prisons sont humides, alors que celles qui sont situées en plein désert comme celles du Naqab, de Nafha et de Ramon, sont très froides en hiver, notamment pendant la nuit.
 4 – Enfants prisonniers
L’association « Defence for Children International – section Palestine » a déposé une plainte auprès du conseiller juridique du gouvernement sioniste, accusant les forces sécuritaires de l’occupation d’avoir torturé des enfants dans la prison de Jalame. L’association a déclaré qu’au mois de septembre 2012, ces forces ont arrêté 5 enfants, avant de les emmener au centre d’interrogatoire d’al-Jalame, situé dans l’entité sioniste, ce qui représente une violation de l’article 76 de la 4ème convention de Genève, qui interdit le transfert des civils de la zone occupée (Cisjordanie, reconnue par l’ONU comme étant une zone occupée). Les enfants ont été enfermés dans des cellules étroites, entre 4 et 29 jours, et privés d’avoir des contacts avec l’extérieur. Ils ont été soumis à des interrogatoires longs, attachés sur des chaises. L’association signale qu’en 2008, 59 enfants avaient été détenus en isolement dans le centre d’interrogatoire d’al-Jalame, de Petah Tikva et de la prison de Hasharon.
Arrêtés il y a presque un an, les 8 enfants du village de Bayt Ummar sont privés de tous leurs droits humains. Le 7 mars 2012, les forces de l’occupation lancent une attaque contre leurs maisons et les emmènent pour interrogatoire. Saed Salibi, Muhan Adi, Sami Abu Jawde ont juste 15 ans. Bilal Awad, Ayesh Awad, Bassel Abu Hashem, Ahmad Issa ont à peine 16 ans. Ils sont détenus dans la prison de Ofer, dans la section 13 réserve aux adolescents. L’enfant Zayn Abu Maria (14 ans) a été condamné à la « détention à domicile » après que ses parents aient été obligés de payer 5000 shekels.
5 – Libérés  
25 ans après, l’occupation libère le prisonnier Maqdisi Jihad Mustafa Ubaydi. Né en 1967, il fut arrêté en janvier 1988. Torturé dans le centre d’interrogatoire al-Moskobiyya, il fut accusé d’appartenir au FPLP et de participer à la résistance, en poignardant des soldats israéliens. Il fut condamné à 25 ans de prison, au cours desquels il connut toutes les prisons de l’occupation et ses centres d’interrogatoire.
20 ans après, le prisonnier Ahmad Arida (42 ans), du village Arraba près de Jénine, a été libéré.  En janvier 1993, il fut condamné à 20 ans de prison, pour appartenance au mouvement du Jihad islamique en Palestine. Ahmad Arida se trouve dans la prison de Shatta avec son frère Mahmoud (38 ans) détenu depuis 1996 et condamné à la prison à vie. Son second frère, Raddad (36 ans) est enfermé dans la prison de Meggido, depuis 1999 et a été condamné à 19 ans de prison. A sa sortie de prison, Ahmad Arida a réclamé une forte mobilisation pour la libération des prisonniers en lutte et de tous les prisonniers, qui subissent une répression amplifiée depuis quelques années.
6 – Les prisonniers ont-ils le droit de manifester leur joie ? 
Les geôliers de la prison « Eshel » (prison du Naqab) disent non : les prisonniers palestiniens n’ont pas le droit le faire. C’est pourquoi ils doivent être punis et réprimés. Suite à la découverte d’un passage vidéo qui montre des prisonniers en train de féliciter l’un de leurs camarades, qui vient de se fiancer, ce passage circulant sur les sites facebook, la direction carcérale de l’occupation a envoyé ses forces spéciales contre les prisonniers : ceux qui paraissent sur la vidéo ont été isolés (27 prisonniers), les cellules de la  section 10 ont été fouillées de fond en comble, c’est-à-dire que les affaires privées des prisonniers ont été dispersées, les prisonniers ont été interdits de visites familiales et des visites inter-cellules, pendant deux mois. Les prisonniers ont refusé ces mesures punitives et ont commencé un mouvement de protestation, refusant les repas, et dans un communiqué, ils ont donné 48 h à la direction carcérale pour arrêter ses attaques, avant qu’ils n’envisagent d’autres mesures (20 janvier).
Les unités spéciales formées pour la répression des prisonniers sont intervenues le 21 janvier contre la section 8 de la prison du Naqab.
7 – Portrait 
La dernière arrestation de Mohammad Kanaane (Abu Asaad), Palestinien originaire du village de ‘Arrabe en Galilée (occupée en 1948) date d’avril 2012. Il a été condamné à 15 mois de prison ferme. Son crime ? Ne pas avoir repecté la « détention à domicile » prononcée contre lui un an plus tôt, parce qu’il avait participé à la journée d’al-Nakba, dans le Golan occupé et soutenu les réfugiés palestiniens, venant de Syrie, qui avaient pu y entrer. Mohammad Kanaane a été secrétaire général du mouvement Abnaa al-Balad, jusqu’au début de 2012, date à laquelle le mouvement fut recomposé et sa direction collégiale unifiée. Au cours de l’été 2003, il est arrêté pendant quelques semaines pour avoir organisé un camp de jeunes, au cours duquel le drapeau palestinien fut hissé. Quelques mois plus tard, en février 2004, il est arrêté alors qu’il se trouvait chez lui, ainsi que son frère Hussam Kanaane et un autre membre du mouvement, Sahar Abdo, au cours d’une opération policière de grande envergure, notamment à Arrabe : sa maison est fouillée de fond en comble, ses affaires et celles de son épouse et de ses enfants confisquées ou dispersées, sa propre mère agressée. A Haïfa, les locaux du mouvement sont vandalisés. Si Sahar Abdo est libérée un mois plus tard, Mohammad sera détenu pendant 4 ans, alors que son dossier « sécuritaire » est vide, et son frère Hussam sera condamné à 9 ans de prison. En 2010, son propre fils, Asaad, est arrêté, accusé d’avoir pris à partie un Palestinien de ‘Arrabe, engagé dans l’armée de l’occupation. Il sera condamné à dix mois de prison.
Abu Asaad fut maintes fois détenu « administratif » (ce qui correspond dans les territoires occupés en 48 à une « détention à domicile »). Militant nationaliste infatigable, il participe, lorsqu’il est libre de ses mouvements, à toutes les manifestations et les actions en faveur des droits de son peuple. En prison, il a écrit de nombreux poèmes, et écrit régulièrement des articles diffusé sur internet, à propos de la situation palestinienne et arabe. Il est détenu dans la prison de Shatta, mais sa famille est souvent empêchée de lui rendre visite.
8 – Solidarité 
A l’initiative du FDLP, un rassemblement de solidarité est organisé à Salfit, en Cisjordanie, avec les prisonniers grévistes de la faim, et notamment Samer Issawi. 7 jeunes Palestiniens mènent une grève de la faim en solidarité avec les prisonniers, dans la tente dressée dans ce but.
Un mouvement de solidarité avec la lutte des prisonniers palestiniens, sur internet, a vu le jour. C’est la campagne « Who’s Samer ? » lancée par des jeunes de Gaza en collaboration avec plusieurs militants américains. Il s’agit de faire connaître la bataille menée par Samer Issawi, prisonnier « administratif » d’al-Qods, qui avait été libéré lors de l’opération d’échange en octobre 2011 contre le soldat sioniste Shalit.
Les réfugiés palestiniens du camp al-Am’ari (Cisjordanie) se sont révoltés en soutien aux prisonniers détenus dans la prison d’Eshel, sauvagement réprimés par les autorités carcérales. Les forces sécuritaires sont intervenues pour réprimer les manifestants, qui avaient coupé la route avec des pneus en flamme. Par ailleurs, le silence de la télévision de l’Autorité sur le mouvement de grève de la faim mené par les prisonniers et la solidarité avec eux a été dénoncé par sheikh Khodr Adnane, qui s’est inquiété du degré d’insouciance de l’Autorité et de ses médias, alors que les prisonniers en grève de la faim risquent la mort à tout instant. Cependant, le président de Nadi al-Assir, Kaddoura Farès, ancien prisonnier libéré suite aux accords d’Oslo, a annoncé la formation d’un « conseil de défense des prisonniers en grève de la faim » à Ramallah afin de coordonner toutes les activités de solidarité avec les prisonniers. Il a également annoncé que le gouvernement égyptien est en cours de négociations avec l’entité occupante pour la remise en liberté de tous les prisonniers qui avaient été libérés lors de l’opération d’échange en octobre 2011.