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« Le droit à la résistance jusqu’à la libération de la Palestine » – Interview de Z. Nakhalé

« En 30 ans, notre mouvement s’est développé et consolidé, et nos moyens se sont accrus »

Résumé de l’interview de Ziyad Nakhalé, adjoint du secrétaire général du Mouvement du Jihad Islamique en Palestine

A l’occasion du 30ème anniversaire de la naissance du mouvement (1987 – 2017), la chaîne al-Mayadeen a mené une interview avec le dirigeant Ziyad Nakhalé, au cours de laquelle il a expliqué la position de son mouvement quant aux efforts de réconciliation entre le Hamas et le Fateh, au Caire, quant aux constantes et variantes pour le mouvement dans sa lutte et résistance contre l’occupation sioniste de la Palestine. Il a abordé le développement de son mouvement en 30 ans, et l’apport important de sa branche armée, les brigades al-Quds, dans la résistance aux agressions sionistes, que ce soit dans la bande de Gaza ou le reste du pays. Il a également dénoncé les tentatives de normalisation des relations entre des régimes arabes et l’entité sioniste.

Constantes et variantes :

Pour le Mouvement du Jihad islamique en Palestine, les constantes sont les principes du mouvement, depuis sa naissance : la Palestine, du fleuve à la mer, est la patrie du peuple palestinien ; refus de reconnaître l’occupant, quelles que soient les pressions exercées ; l’unité du peuple palestinien, dans la patrie et l’exil ;  le droit à la résistance jusqu’à la libération de la Palestine.

Quant aux variantes, ce sont les positions envers ce qui est proche de ces constantes et ce qui s’en éloigne. « Nous avons un réseau de relations avec des partis et des pays », en fonction de ce principe. « Notre position est claire, elle distingue entre l’ennemi et l’ami, et entre ceux qui sont avec ou contre la résistance ». Nous ne pouvons pas reconnaître les frontières de 67, même si d’autres les reconnaissent en tant que programme provisoire. D’ailleurs, ces frontières sont « une tromperie », et l’entité sioniste ne les accepte pas, puisqu’elle y a installé ses colonies. A la question de savoir si cette position de principe n’isole pas le mouvement du reste des formations palestiniennes, M. Nakhalé a répondu que le fait que son mouvement soit isolé à cause de son attachement aux principes de la lutte et de la résistance pour libérer la Palestine est plutôt un honneur. Car de qui ou de quoi est-on isolés ? « d’être au service de l’occupant, ou de nos principes ? »

Il est vrai que la situation actuelle est très difficile, mais le mouvement a déjà vécu des moments semblables, après les accords d’Oslo. Son fondateur et premier secrétaire général, le martyr dr. Fathi Shiqaqi, a été assassiné par le Mossad, et le mouvement, cadres, dirigeants et militants, ont été poursuivis, arrêtés et même tués, par ceux qui se sont installés sur un bout de la Palestine, après ces accords. Mais « nous avons maintenu nos principes et notre ligne » malgré les pressions et les conditions difficiles faites aux résistants. Aujourd’hui, le mouvement est beaucoup plus ancré dans la société palestinienne, partout en Palestine et dans le monde. « Nous sommes en meilleure position » qu’à l’époque des accords d’Oslo, et « nous avons des dizaines de milliers de combattants ».

Quant aux Brigades al-Quds, la branche armée du mouvement, son développement est qualitatif, et quantitatif à la fois. Elles ont mené de grandes batailles en Cisjordanie, et aujourd’hui, elles sont incontournables dans la bande de Gaza. En Cisjordanie, la situation est difficile, à cause des arrestations et des poursuites par l’occupant et l’Autorité palestinienne à la fois, des militants du mouvement. Même les étudiants et les membres des associations de soutien aux familles des martyrs et des prisonniers sont poursuivis. Dans la bande de Gaza, la présence des Brigades est incontestable, elles ont mené des batailles contre l’occupant, et des centaines de martyrs sont tombés. Les moyens qu’elles possédaient en 2014 se sont plus que multipliés depuis, elles peuvent résister à toute agression et protéger la bande de Gaza. « Nous avons des capacités et des moyens », et « nous avons confiance dans nos capacités ».

Ordre d’assassiner dr. Ramadan Shallah

« Nous sommes un mouvement de résistance, des combattants », et le mouvement s’attend depuis sa naissance à être poursuivi par ceux qui soutiennent l’entité sioniste. Pendant 20 ans, dr. Ramadan a consolidé le mouvement en tant que secrétaire général, il a maintenu la vision claire du mouvement envers le conflit et le rôle des Palestiniens dans ce conflit, et ses cadres et dirigeants ont développé des capacités importantes. Le dirigeant du mouvement est non pas seulement recherché par le FBI, mais  l’ordre fut donné de l’assassiner, à la différence de tous ceux qui figurent sur cette liste, parce qu’il a réussi à maintenir le cap et à multiplier les capacités du mouvement. Pour les ennemis de la Palestine, il est gênant. Il est visé par ceux qui veulent liquider la question palestinienne. En Cisjordanie, le mouvement vit des moments difficiles, il est visé à cause de sa ligne politique, ses principes et ses constantes, et des pressions sont exercées pour qu’il les modifie.

La réconciliation : les craintes

 « Nous avons appelé et nous approuvons la réconciliation, afin de régler les problèmes humains et économiques » de la population dans la bande de Gaza, et pour rompre blocus « c’est le droit des gens ». La crainte exprimée par le mouvement concernant la réconciliation en cours au Caire, entre les mouvements Hamas et Fateh vient du fait d’abord que l’entité « israélienne » et les Etats-Unis l’ont approuvée et ont donné le feut vert, ce qui signifie que cette réconciliation est menée dans le cadre d’un projet américain, le projet appelé « règlement du siècle », qui est la liquidation de la question palestinienne.

Il y a la question des armes de la résistance, qui suscite la crainte. Pour le mouvement, la question ne doit pas être abordée, car la réconciliation concerne uniquement les questions humaines et économiques. Des voix se sont exprimées à ce sujet, disant vouloir en finir avec les armes de la résistance, mais au cours des discussions du mouvement avec l’Egypte, cette dernière avait assuré que ni la question de la résistance, ni ses armes, ne sont concernées par la réconciliation. « Pour notre part, nous ne remettrons pas les armes ! » La crainte vient aussi du fait que jusqu’à présent (10/10), le mouvement Hamas a fait des pas en direction de l’Autorité, mais cette dernière n’a encore fait aucun pas en direction de la bande de Gaza et de Hamas. Ce qui laisse croire que le prix à payer serait plus grand que ce le Hamas a déjà payé. Il a aussi la question du programme qui sera adopté par le gouvernement de l’Autorité : est-ce qu’il compte mener des négociations avec l’entité de l’occupation ? « Après avoir livré 80% de la terre de Palestine aux occupants, va-t-il négocier sur les 20% qui restent ? » C’est pourquoi il faut discuter entre Palestiniens pour adopter un programme unitaire, où il serait interdit de négocier par quiconque. Personne n’a le droit de négocier au nom du peuple palestinien. Ce n’est pas parce qu’une formation a mené une résistance il y a 50 ans qu’elle a le droit de négocier au nom du peuple tout entier. « Si une partie des formations a changé de position, devons-nous changer la nôtre ? »

L’adjoint du secrétaire général du Mouvement du Jihad islamique en Palestine a réaffirmé la position du mouvement envers l’Autorité et les élections législatives ou présidentielles qui y sont organisées, qui est le refus de participer à toutes ces élections, car l’Autorité palestinienne issue des accords d’Oslo n’exerce aucune souveraineté sur la Palestine, elle sert plutôt à masquer l’occupation, cette autorité aide l’occupant, poursuit les combattants et ne protège pas le peuple palestinien. Quelles que soient les pressions exercées, passées ou futures, le mouvement ne participera pas aux élections organisées dans ce cadre.

La normalisation avec l’occupant : une menace et un crime

Il est vrai que le mouvement a publié un communiqué très fort, il a quelque temps, contre les Etats qui cherchent à normaliser leurs relations avec l’entité coloniale. « Notre position est très claire quant à la normalisation, nous la refusons absolument, et nous avons le droit de nous mettre en colère, en cas de normalisation », car le mouvement considère qu’il est du devoir des Etats arabes d’aider la Palestine et les Palestiniens, et non de leur donner des coups de poignard dans le dos. « Nous avons le droit de crier, car les Etats arabes ont des responsabilités envers la Palestine », et ces relations de normalisation avec l’occupant visent la Palestine et les Palestiniens. Pour le mouvement, qui se rapproche vers l’occupant, prend ses distances avec la Palestine.

Les Etats arabes ont une responsabilité envers la Palestine, et n’ont pas le droit de normaliser leurs relations avec l’entité sioniste. Ils doivent aider les Palestiniens à résister. Et parce que les relations du mouvement sont tributaires de la position des partis et Etats arabes envers la Palestine et la résistance, le mouvement a des relations historiques avec le Hizbullah, au Liban, « avec qui nous sommes dans le même front, contre « Israël ».